Chaque 2 mai, la Communauté de Madrid, une des dix-sept communautés autonomes d'Espagne, commémore un événement fondateur de son histoire : la « Journée de Madrid » ou Día de la Comunidad de Madrid. Loin d'être une simple fête régionale, cette date marque le début héroïque de la Guerre d'Indépendance espagnole contre les forces napoléoniennes en 1808. C'est un jour férié emblématique qui honore la bravoure des Madrilènes et leur rôle décisif dans le soulèvement national qui allait suivre.

Au printemps 1808, la capitale espagnole était sous la domination française, une situation née des manœuvres politiques de Napoléon Bonaparte. L'Espagne, alors une puissance affaiblie, avait vu son trône disputé par le roi Charles IV et son fils, Ferdinand VII. Napoléon, tirant parti de ces dissensions familiales, avait orchestré les fameuses Abdications de Bayonne en avril et mai 1808. Loin d'être "battu à mort", Charles IV fut contraint d'abdiquer en faveur de Ferdinand VII, qui à son tour fut forcé de céder ses droits à Napoléon. Ce dernier plaça alors son propre frère, Joseph Bonaparte, sur le trône d'Espagne, sous le nom de Joseph Ier. Cette mainmise impériale sur la couronne espagnole était une provocation insupportable pour le peuple.

L'Étincelle du 2 Mai 1808

La tension montait à Madrid. La présence de milliers de soldats français, commandés par le maréchal Joachim Murat, beau-frère de Napoléon et commandant en chef des troupes impériales en Espagne, était de plus en plus ressentie comme une occupation. Le ressentiment populaire atteignit son paroxysme le matin du 2 mai 1808. Murat, dans une tentative audacieuse de finaliser le contrôle français sur la famille royale, donna l'ordre de transférer les derniers membres de la famille royale espagnole encore présents au Palais Royal de Madrid – notamment l'infant Francisco de Paula, le plus jeune fils de Charles IV, et sa sœur, la Reine d'Étrurie, María Luisa – vers Bayonne, où se trouvait déjà le reste de la famille.

Les gouverneurs espagnols restés à Madrid, pris au piège par la puissance militaire française et craignant de provoquer une réaction violente, durent accepter à contrecœur ces exigences. Cependant, la population madrilène, exaspérée et sentant l'ultime affront, ne l'entendait pas de cette oreille. Alors que les carrosses impériaux s'apprêtaient à quitter le Palais Royal, des foules immenses, composées de citoyens ordinaires, de marchands, d'artisans, des fameux "majos" et "majas" de Madrid, se rassemblèrent spontanément. Un cri retentit : « Qu'ils ne partent pas ! ». Ce fut le signal d'une insurrection populaire immédiate et désespérée.

Le Soulèvement et la Répression

Face à cette opposition inattendue, les troupes françaises, mieux équipées et aguerries, réagirent brutalement. Les dragons et les Mamelouks égyptiens, célèbres pour leur férocité et leur exotisme, ouvrirent le feu sur la foule, provoquant la première effusion de sang. Cette fusillade déclencha une révolte généralisée dans tout Madrid. Armés de couteaux, de ciseaux, de pierres, de tout ce qui leur tombait sous la main, les Madrilènes se soulevèrent contre les soldats français, livrant une bataille de rue chaotique mais féroce. La Puerta del Sol, la Plaza Mayor et les ruelles étroites de la ville devinrent le théâtre d'affrontements sanglants, témoignant de la détermination farouche d'un peuple refusant l'asservissement.

La riposte française fut impitoyable. Murat ordonna une répression féroce pour écraser la rébellion. Les combats se poursuivirent une grande partie de la journée, et la nuit fut marquée par des exécutions sommaires, immortalisées par l'artiste Francisco de Goya dans ses célèbres toiles : "El 2 de Mayo de 1808 en Madrid" (également connu sous le nom de "La Charge des Mamelouks") et "El 3 de Mayo de 1808 en Madrid" (les fusillades de la Moncloa). Ces œuvres d'art ne se contentent pas de documenter l'événement ; elles capturent l'horreur, la résilience et le prix de la liberté, devenant des icônes universelles de la résistance contre l'oppression.

Impact et Héritage

Bien que le soulèvement du 2 mai fut brutalement réprimé en une seule journée, il fut l'étincelle qui alluma le feu de la résistance dans toute l'Espagne. La nouvelle des événements de Madrid se propagea comme une traînée de poudre, incitant d'autres villes et régions à se soulever, marquant le début d'une guerre de six ans qui épuiserait les forces napoléoniennes et forcerait finalement leur retrait de la péninsule ibérique. Ainsi, le 2 mai n'est pas seulement un jour de souvenir ; c'est une célébration de l'esprit indomptable de Madrid et le symbole d'un tournant crucial dans l'histoire de l'Espagne.

Questions Fréquentes sur le 2 Mai à Madrid

Qu'est-ce que le 2 mai commémore à Madrid ?
Le 2 mai commémore le soulèvement populaire de Madrid en 1808 contre l'occupation napoléonienne, marquant le début de la Guerre d'Indépendance espagnole.
Pourquoi le roi Charles IV d'Espagne a-t-il été mentionné dans le contexte de l'invasion française ?
Charles IV et son fils, Ferdinand VII, furent contraints par Napoléon d'abdiquer en faveur de Joseph Bonaparte, le frère de Napoléon, lors des Abdications de Bayonne, ce qui exacerba la colère populaire et précipita le soulèvement.
Quel rôle le général Murat a-t-il joué dans ces événements ?
Le maréchal Joachim Murat était le commandant en chef des troupes françaises à Madrid. C'est lui qui a ordonné le transfert des derniers membres de la famille royale et la répression brutale du soulèvement populaire le 2 mai 1808.
Comment la rébellion du 2 mai a-t-elle été immortalisée dans l'art ?
Le célèbre peintre espagnol Francisco de Goya a immortalisé les événements du 2 et 3 mai 1808 dans ses œuvres emblématiques "El 2 de Mayo de 1808 en Madrid" (La Charge des Mamelouks) et "El 3 de Mayo de 1808 en Madrid" (Les Fusillades du 3 mai), qui sont des témoignages poignants de la violence et de l'héroïsme de ces jours.
Quel a été l'impact à long terme du soulèvement du 2 mai ?
Bien que brutalement réprimé, le soulèvement du 2 mai a servi d'étincelle pour une résistance nationale plus vaste, déclenchant la Guerre d'Indépendance espagnole qui durera six ans et contribuera de manière significative à l'affaiblissement de l'Empire napoléonien en Europe.